Sommaire

L’allaitement maternel exclusif est recommandé par les autorités de santé et devrait être encouragé chez toutes les mères qui en expriment le souhait. Il existe de nombreuses idées reçues en matière de nutrition au cours de l’allaitement pouvant décourager certaines femmes. En réalité, sauf dans certaines situations individuelles à risque, une femme qui allaite son enfant n’a pas à se soumettre à un régime alimentaire spécifique. Il est conseillé de suivre les principes d’une nutrition saine, variée et équilibrée au quotidien, en se référant aux repères de consommation du PNNS. S’en tenir à ces recommandations aidera également la mère à retrouver son poids initial après l’accouchement. 1,2

Allaitement maternel et nutrition

Allaitement maternel exclusif : recommandé jusqu’à 6 mois révolus

Depuis plusieurs années, l’OMS recommande un allaitement exclusif au sein pendant les 6 premiers mois de la vie. 1,3 C’est en effet le mode d’alimentation le plus approprié pour le nourrisson, lui assurant une croissance et un développement optimaux jusqu’à 6 mois. 2 Il présente de nombreux avantages nutritionnels et immunitaires pour le fœtus 5 (cf article « Alimentation des nourrissons et enfants en bas âge »), mais également certains bénéfices pour la santé de la mère 4 :

  • les suites de couche sont facilitées : les sécrétions hormonales provoquées par la mise au sein diminuent le risque d’infections du post-partum et aident l’utérus à reprendre plus vite sa taille, sa forme et sa tonicité
  • la perte de poids est plus rapide dans les 6 premiers mois du post-partum
  • l’incidence des cancers du sein et de l’ovaire avant la ménopause est diminuée

Notons enfin qu’il existe tout de même de rares contre-indications à l’allaitement maternel 2,4:

  • chez la mère : maladie cardio-vasculaire ou respiratoire sévère, hémopathie ou cancer en cours de traitement, infection par le VIH
  • chez le nouveau-né : galactosémie

Recommandations nutritionnelles durant l’allaitement du bébé

En termes de nutrition, aucune règle alimentaire spécifique n’est justifiée ni interdite chez une femme qui allaite, y compris pour la quantité d’eau absorbée (à l’exception de la caféine et de l’alcool). 2

Calcium

La production de lait augmente les besoins en calcium de la mère. Cependant cette augmentation est compensée par une réduction des pertes urinaires en calcium et par une augmentation transitoire de la résorption osseuse pendant les 3 à 6 premiers mois. Ainsi, supplémenter les femmes allaitantes en calcium n’a d’effet bénéfique ni sur la mère ni sur le nourrisson et la consommation de 2 produits laitiers par jour, comme le recommande le PNNS, suffit à fournir un bon apport calcique après la grossesse1

Fer

La concentration en fer du lait maternel est indépendante des apports en fer et du statut martial de la mère. 1,4 La faible concentration en fer du lait maternel (en moyenne 0,8 mg/L dans le colostrum et 0,3 mg/L dans le lait mature) est partiellement compensée par sa biodisponibilité qui est plus élevée que celle du lait de vache. 4 De plus, les réserves en fer du nourrisson né à terme sont indépendantes du statut martial maternel et il est protégé d’une anémie pendant les 6 premiers mois par le recyclage du fer endogène. 1 En l’absence d’anémie maternelle, une supplémentation martiale n’est pas justifiée chez la femme qui allaite et ses réserves en fer vont se reconstituer après la grossesse. 1

Iode

Pour l’iode, le transfert du lait maternel vers le nourrisson est estimé à 50 μg/jour. La concentration en iode du lait est dépendante des apports maternels, il est donc nécessaire de privilégier la consommation d’aliments  naturellement riches en iode et l’utilisation de sel iodé

Dans quels aliments trouver naturellement de l’iode ?  Dans les crustacés bien cuits, les moules, les poissons de mer (cabillaud ou morue, maquereau, merlan, thon, lieu, hareng, sardine, raie, roussette, saumon...) qu’ils soient frais, en conserves ou surgelés ; le lait et produits laitiers (yaourts, fromage blanc, fromages...) ; les œufs.

Matières grasses

Concernant les lipides, la teneur du lait maternel en acides gras, notamment polyinsaturés, est fortement influencée par l’alimentation. 1 Le lait maternel représente la seule source exogène de DHA pour le nourrisson exclusivement nourri au sein. Or, cet acide gras est un nutriment biologiquement important et son apport adéquat pendant l’enfance peut être particulièrement crucial pour assurer un développement neurologique optimal. Il peut également avoir des effets sur la fonction immunologique et immunitaire et peut être aussi sur l’état psychologique et biologique de la mère. Il a ainsi été proposé un apport adéquat de 250 mg par jour chez la femme allaitante. Pour les autres acides gras, les ANC sont identiques à ceux préconisés chez le sujet adulte 6 :

  • acide linoléique : 4,0 %
  • acide α-linolénique : 1,0 %
  • AGPI-LC n-3 (EPA et DHA): 500 mg

Ces valeurs étant valables pour un apport énergétique de 35-40 % sous forme de lipides. Il est donc essentiel de suivre les repères du PNNS en termes de consommation de poisson, soit au moins deux fois par semaine, dont aumoins une fois du poisson gras. Ce repère permettant de couvrir les besoins en acides gras polyinsaturés à longue chaine. 1

Caféine et alcool

La caféine diffuse dans le lait maternel. Sa concentration y est faible, mais son élimination est plus lente chez le nouveau-né que chez l’adulte. La consommation de café ou de caféine ne semble pas avoir de conséquences chez le nourrisson, mais il est souhaitable de limiter les quantités absorbées à 300 mg/jour, soit 2 à 3 tasses de café. En effet, il est possible qu’une consommation de plus de trois tasses de café par jour puisse entraîner une accélération des battements cardiaques du fœtus ou du nouveau-né. 1,2

Enfin, il est important de rappeler à vos patientes que la consommation d’alcool est déconseillée durant la période de l’allaitement. En effet, la concentration d’alcool dans le lait maternel est voisine de celle du sérum. Une consommation en grande quantité d’alcool entrave donc la sécrétion de lait et est dangereuse pour l’enfant. Il est donc conseillé à la mère qui allaite de s’abstenir de boire de l’alcool. Si un verre pris occasionnellement lors d’activités sociales n’est pas contre-indiqué, il est par contre souhaitable de donner le sein avant la consommation d’une boisson alcoolisée plutôt qu’après. 1,2

Prévention de l’allergie alimentaire chez le bébé

L’efficacité de l’allaitement au sein dans la prévention de l’allergie alimentaire est controversée. 7 La plupart des travaux montrent un effet protecteur de l’allaitement maternel exclusif, lorsqu’il est poursuivi plus de 3 mois, sur le risque d’eczéma atopique chez les enfants à risque. En revanche  son effet sur la survenue de l’asthme reste débattu. 1

Quoi qu’il en soit, l’allaitement maternel fait l’objet d’une recommandation consensuelle dans la prévention de l’allergie alimentaire. L’allaitement maternel exclusif est ainsi recommandé unanimement, dans l’idéal jusqu’aux 6 mois du bébé, pour prévenir l’allergie alimentaire chez les nourrissons à risque. 1,7

Les régimes d’exclusion des allergènes alimentaires chez la femme allaitante n’ont pas montré de résultats convaincants. Il est donc raisonnable de n’envisager une éviction alimentaire qu’après analyse précise des circonstances familiales individuelles. Seule l’arachide doit être exclue de l’alimentation durant l’allaitement. Il est en effet possible que la consommation de cet aliment au cours de la grossesse et de l’allaitement diminue l’âge de début de cette allergie chez l’enfant. L’éviction de l’arachide, aliment nutritionnellement non indispensable, chez toutes les mères d’enfant à risque est donc recommandée tant au cours de la grossesse qu’au cours de l’allaitement. 1,7

Retrouver son poids initial

Il est important de rappeler à vos patientes qui allaitent que l’allaitement, comme la grossesse, n’est pas une période favorable pour mener des régimes hyperprotidiques ou hypocaloriques. 1 Il est d’ailleurs conseillé aux femmes qui allaitent de ne pas chercher à perdre immédiatement le poids accumulé lors de la grossesse. Ces réserves étant nécessaires à la production de lait maternel.2

L’allaitement du bébé à lui seul ne permet pas aux femmes de retrouver un poids et une masse grasse « normaux », mais il peut les y aider. 1,2 Ce retour au poids antérieur après l’accouchement devra se faire progressivement et sera favorisé par une alimentation et une activité physique proches des repères du PNNS. 1

Après l’accouchement, et durant la période d’allaitement du bébé, les mêmes conseils nutritionnels que durant la grossesse doivent être suivis, c'est-à-dire avoir une alimentation équilibrée et variée, suivant au plus près les repères de consommation établis par le PNNS. 1

Enfin, la pratique d’une activité physique peut aider la patiente à retrouver son poids antérieur plus rapidement. Cependant la reprise de l’activité sportive devra être progressive au cours du post-partum, surtout en cas d’allaitement du bébé. Et elle devra débuter après une rééducation périnéale précoce, suivie par une rééducation abdominale différée au 4ème mois suivant l’accouchement. 1

Pour en savoir plus

  • Livret d’accompagnement destiné aux professionnels de santé du Guide nutrition des pendant et après la grossesse
  • Le guide de l'allaitement maternel

Sources 

  1. PNNS. La santé vient en mangeant et en bougeant. Le guide nutrition pendant et après la grossesse. Livret d’accompagnement destiné aux professionnels de santé. Septembre 2007.
  2. Anaes. Allaitement maternel. Mise en œuvre et poursuite dans les 6 premiers mois de vie de l’enfant. Recommandations. Mai 2002.
  3. OMS. Centre des médias. Alimentation du nourrisson et du jeune enfant. Aide mémoire n°342. Juillet 2010. Disponible sur le site : https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/infant-and-young-child-feeding 
  4. PNNS. Allaitement maternel. Les bénéfices pour la santé de l’enfant et de sa mère. Février 2005.
  5. PNNS. Livret d’accompagnement du guide nutrition des enfants et ados pour tous les parents destinés aux professionnels de santé. Septembre 2009.
  6. Anses. Actualisation des apports nutritionnels conseillés pour les acides gras. Rapport d’expertise collective. Edition scientifique. Mai 2011.
  7. Chouraqui JP et al. Comité de nutrition de la société française de pédiatrie. Alimentation des premiers mois de vie et prévention de l’allergie. Archives de pédiatrie 2008;15:431-442.

Date de mise à jour : 09/06/2023

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