C’est ce qui ressort de l’analyse des statistiques françaises de décès. Contrairement à ce qui était attendu, le taux de mortalité n’a pas baissé en 2022. Au contraire, l’année affiche une surmortalité de 54 000 décès, en particulier chez les plus de 75 ans et les moins de 55 ans.
Une étude publiée dans le Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire a utilisé les statistiques nationales de causes de décès pour estimer le taux de mortalité et identifier ses causes en 2022 puis comparer son évolution aux tendances observées entre 2015 et 2019 et depuis 2020.
Après deux années marquées par l’épidémie de COVID- 19, l’année 2022 a vu un recul de l’épidémie mais les taux de mortalité ne sont pas revenus à la situation pré-COVID. Un excès de 54 000 décès toutes causes confondues la caractérise. La surmortalité est plus élevée chez les plus de 75 ans (+9,1 %, soit +39 600 décès) et chez les moins de 55 ans (+8,9 %, soit +3500 décès).
La mortalité toutes causes
Près de 47 % des décès concernent les plus de 85 ans et c’est plus qu’en 2021. On compte 398,6 décès pour 100 000 habitants de plus en 2022 qu’en 2021 (taux de 14 323,9). Près de 15 % des décès surviennent avant 65 ans et cela baisse légèrement par rapport à 2021. L’âge moyen de décès reste relativement stable, autour de 79 ans. Le taux de mortalité masculine est 1,7 fois supérieur au taux de mortalité féminine.
Tumeurs et maladies de l’appareil circulatoire, premières causes de décès
Les tumeurs sont la première cause de décès en 2022 (25,5 % des décès) et concernent davantage des hommes (55,5 %) et les plus de 65 ans (50 %). Les tumeurs des voies respiratoires (poumon/bronches/trachée) représentent 18,0 % des décès par tumeur. Dans 66,7 %, il s’agit d’hommes. Les moins de 65 ans représentent un quart des décès. Suivent les tumeurs colorectales, du sein (exclusivement féminin), du pancréas et de la prostate. Le taux standardisé de décès chez les hommes est supérieur à celui des femmes pour une grande majorité des tumeurs (1,7 fois).
Les maladies de l’appareil circulatoire sont la deuxième cause de décès (20,8 %) et concernent presque autant les hommes (47 %) que les femmes. Ce sont les premières causes de décès chez les plus de 85 ans. Les cardiopathies ischémiques représentent 22,2 % des décès et les maladies cérébrovasculaires, 22,5 %.
Les maladies de l’appareil respiratoire ont fortement progressé et deviennent la troisième cause de décès (6,7 %) dont plus de la moitié concerne les plus de 85 ans et deux fois plus d’hommes que de femmes. Les pneumonies sont les plus courantes (30,7 % des pathologies respiratoires) et notamment chez les plus de 85 ans.
Des causes externes (accidents, suicides) sont responsables de 6,7 % des décès, la COVID de 6,1 % des décès et 10 % des décès n’ont pas de cause connue ou précisée (mort subite, arrêts respiratoires, etc.).
Pas de poursuite de la baisse de la mortalité
Le taux de mortalité de 2022 (886,6 pour 100 000 habitants), est nettement plus élevé que ce que prédisaient les tendances de diminution au cours des années passées (810 pour 100 000 habitants) notamment chez les femmes et pour les mortalités provenant de maladies de l’appareil circulatoire. Des tendances similaires sont observées aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Norvège. Le taux de décès par tumeur poursuit sa tendance à la diminution pour tous les âges chez les hommes mais pas chez les femmes, chez lesquelles il se stabilise, porté par une hausse des tumeurs du poumon, bronches, trachée.
De même, plusieurs causes de mortalité sont plus élevées que ne le suggéraient les tendances à la baisse des années passées. C’est le cas de la mortalité par maladies endocriniennes, nutritionnelles et métaboliques, portée par les décès par malnutrition protéinoénergétique chez les plus de 85 ans et les hypovolémies. C’est aussi le cas de la mortalité par maladies de l’appareil digestif, et de celle due à des maladies de l’appareil génito-urinaire.
Autre fait marquant, la mortalité due à des causes externes est en hausse et significativement plus élevée que ce que suggère la prolongation de sa tendance 2015—2019, notamment chez les plus de 85 ans portée par la hausse des accidents (chutes surtout) et des morts subites inexpliquées.
Au final, en 2022 le taux de mortalité global est stable par rapport à 2021 mais augmente chez les plus de 85 ans et est nettement plus élevé que ce qui était attendu suite à la baisse des années 2015—2019. Avec l’allongement de la durée de la vie et l’accumulation des comorbidités dans la population, les auteurs estiment qu’une collecte plus précise de l’information est nécessaire pour permettre une analyse plus fine des causes de mortalité. Rappelons que cette surveillance est utile pour connaître l’état de santé de la population mais aussi pour objectiver les effets sur le long terme des politiques publiques.
Reference
Fouillet A, Cadillac M, Rivera C, Coudin É. Grandes causes de mortalité en France en 2022 et tendances récentes. Bull Epidemiol Hebd 2024;(18):388—411.
https://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2024/18/2024_18_1.html
C. Costa © Société Française de Nutrition. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Date de publication : 20/12/2024
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